Couleurs Cactus

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Désirs inavoués > un atelier d'écriture qui démarre ...

Désirs inavoués ...

C'est un cycle de 6 ateliers d'écriture animés par Sophie Vallon qui a démarré  mardi 10 mars. 

Au coeur de ce projet, un retour en enfance. Des objets, des photographies, apportés par les participants, servent de point de départ à l'écriture. Des lieux incongrus pour écrire (librairie, magasin de jouets, centre de loisirs...) vous font entendre les cris, les paroles, les silences... vous ramènent à des moments vécus ou espérés, à des espoirs déçus ou des petits moments de bonheur oubliés. Nous sublimons le banal et laissons une large place à l'affect, à l'intime.

 

Prochaines dates  : les   31 mars et les 4 et 11 avril 

 

 

Séance du 10 mars 

 

Voici quelques textes écrits par une des participantes, Sabrina Robert

 

"Le désir pour moi ? Inavoué ou assumé, fantasme ou réalité, le désir est pour moi ce qui fait vivre autrement. Des envies, des projets, des rêves qui cassent le monde tel qu'il est pour en faire ce qu'on veut. Il peut prendre la forme d'un caprice d'enfant non réalisé ou être une envie plus animale et plus secrète. C'est comme un moteur intérieur."

 

 

Désir d'enfant ...

"Ma jupe me gêne. Je la mets très souvent mais elle me gratte, elle s'envole parfois et j'ai toujours peur qu'on voit ma culotte.

 

Surtout quand Franck n'est pas loin.

 

Franck c'est le copain de mon grand frère: il est grand, il se tient toujours très droit comme s'il savait toujours ce qu'il faisait, il est beau.

 

Moi j'ai 10 ans, alors je sais bien que je n'oserai jamais lui parler. Mais parfois quand je le regarde, il me regarde aussi. Et je me dis que j'aimerai bien être dans ses bras.

 

Ce serait comme un prince venu rien que pour moi, quoi!"

 

 

... et d'adolescente.

 

"Avec Agnès, on partageait tout. On nous appelait même les soeurs jumelles, alors que l'une était rousse et l'autre brune comme du charbon. Il faut dire qu'on était en phase toutes les deux: le lycée n'était pas notre première passion et on prenait beaucoup de plaisir à animer les cours à notre façon. On faisait des conneries ensemble, on était punies ensemble.

Et on s'en félicitait, forcément.

C'est aussi à ce moment-là que j'ai découvert que je plaisais parfois, j'étais courtisée par les garçons. Premiers baisers, premières caresses, mes sens s'éveillaient. Au fond, j'avais un peu peur mais je me sentais différente et je crois que j'aimais ce qui se passait.

Agnès moins.

Un jour, chez elle, sur son lit, au cours d'un papotage dont on avait le secret, elle me dit qu'elle n'était rien sans moi.

Et puis les vacances suivantes, sa correspondance régulière, assidue et abondante.

Je ne voyais rien venir, ma tête était tournée vers mon flirt du moment et ses "merci d'exister" à chaque fin de lettre ne m'alertaient pas.

Puis vint la rentrée. Et la déclaration d'Agnès. Enflammée. A mon égard. Consternation."  

 

 

Séance du 17 mars

 

1/ Promenade dans les rayons de la librairie jeunesse chez Maupetit:

 

"Drôle histoire de loup: il a des petites oreilles et un très long nez. Il n'a pas une tête à croquer les enfants, on dirait qu'il est triste.

Il y a beaucoup de livres ici, de toutes les couleurs.

Un très grand dans le coin, avec une très grande girafe et des tout petits poussins qui lui grimpent dessus; ils prennent même une échelle tellement elle est grande!

Des coloriages avec des châteaux et des princesses, j'aimerai bien en avoir un comme ça. Je ne dépasse presque plus, alors j'aimerai bien l'essayer.

Et puis un tout petit livre en carton: à chaque page, on voit une grenouille qui pose des questions et un soleil qui a l'air très fatigué. J'aimerai bien savoir ce qu'elle veut cette grenouille."

 

 

2/ Regard d'un enfant de 6/7 ans sur ces livres:

 

"Il y a quelques jours, maman m'a lu un livre.

Au début, ça ne me disait rien: il y avait une immense girafe en couverture et plein de poussins dessus, je me suis dit que c'était une histoire pour Matthieu mon petit frère, pas pour moi.

Je suis grande moi, j'ai 6 ans 3/4 et je sais presque lire.

Alors, au début de l'histoire, je déchiffrais les mots pendant la lecture de maman. Il y avait des poussins et une girafe qui devenaient amis et je crois qu'ils partaient à l'aventure pour découvrir des nouveaux pays.

Je ne suis pas sûre parce qu'à vrai dire, je n'écoutais plus trop. Mais les images, elles, me plaisaient: en fait, c'était moi qui allais sur cette île déserte pour pêcher des poissons. Puis c'était moi la pirate qui essayais de ne pas faire couler le bateau. Et puis, deux pages plus loin, c'était encore moi qui trouvais le coffre et ses trésors cachés tout au fond. Quand le livre s'est refermé, croyez-moi, j'étais déjà loin.

Depuis que maman m'a lu cette histoire, je sais qu'un jour je partirai à l'aventure."

 

 

3/ Héros et anti-héros d'enfance:

 

Alice détective

Boule et Bill

Prince de Motordu

Astro le petit robot

Obélix et Idéfix

Tintin et le Capitaine Haddock

Sophie (des Malheurs de Sophie)

Tom-Tom et Nana

la sorcière dans "la sorcière habite au 47"

 

 

4/ Avec un ton d'adulte, raconter le rapport de cet enfant à ses héros:

 

" Elle était fascinée par ce livre. Elle me le réclamait tout le temps. J'avais essayé de changer d'histoire, mais rien à faire, il fallait au moins commencer par celui-là.

 

Rien que le titre: "la sorcière habite au 47". A dire avec le ton évidemment, mettre du suspense mais pas trop de tragique quand même. Il suffisait d'ouvrir le livre pour qu'elle se taise brutalement, presque religieusement. Elle s'asseyait alors dans son lit, droite comme un i, et m'annonçait avec un grand sérieux qu'on pouvait commencer. En fait, elle connaissait l'histoire par coeur et pouvait presque réciter le texte de tête. Mais elle voulait que ce soit moi qui lui lise, absolument. Comme si cette histoire nous reliait toutes les deux.

 

On se rendait alors chez cette voisine étrange, en prenant un ascenseur gigantesque qui avançait très lentement et qui grinçait horrrrrriblement. (oui, à prononcer selon elle comme ça: elle grimaçait alors de frayeur et de plaisir...)

 

On traversait ensuite le couloir maléfique pour pénétrer dans l'appartement de la voisine. La nuit tombait et on entendait que le cliquetis de la pendule dans le salon.

 

Plus les pages avançaient, plus elle se recroquevillait dans son lit et, lorsque la vieille dame étrange du livre proposait d'ouvrir le placard ensorcelé, elle se cachait les yeux sous la couette pour ne pas voir ce qui allait en sortir.

 

Comme à chaque fois, la voisine en sortait des bonbons et des gâteaux, et comme à chaque fois, elle récitait avec moi la dernière phrase en riant: "sapristi, j'ai cru que je vous avais fait peur!".

 

 

Qu'il est délicieux d'avoir des frissons..."

 

 

Séance du 24 mars 

 

Lorsque je serai grande, je me marierai avec Dave parce qu’il est blond et qu’il a les yeux bleus. Et j’irai vivre avec lui sur son bateau, même si je n’aime pas les bateaux et je continuerai à écouter ses chansons en boucle.

Je serai maîtresse d’école, comme Maman. J’écrirai sur le grand tableau noir, je ferai des dictées et je distribuerai des bons points.

En tout cas, quand je serai grande, je ne serai pas comme eux. Je dirai toujours la vérité. Je ne mentirai jamais, même si ça fait mal. De toute façon, je sais bien que Maman elle va mourir, malgré leurs sourires, leurs paroles de réconfort, leurs « on fait comme si de rien n’était ». Tous des menteurs ! Ce soir, Maman va partir et je sais que je ne la verrai plus jamais et à cause de leurs mensonges, je ne peux même pas lui dire « au revoir ». Soi-disant, ils mentent pour me protéger, parce que je suis petite et que je ne peux pas comprendre. Tu parles ! Ils ont peur de ma réaction, c’est tout ! Mais moi, non seulement je n’aurai plus de Maman mais en plus, je n’aurai plus confiance dans ce que me dira Papa. Je ne croirai plus les docteurs, j’aurai tout le temps peur des hôpitaux. On ne soigne pas à l’hôpital, on ment.

Quand je serai grande, je dirai toujours la vérité, même si ça fait pleurer.

 

Magali François

 

 

 

 

 

 

 



12/03/2015

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